Rugby. Au lendemain du quatrième sacre planétaire de l’Afrique du Sud, Lenaïg Corson est revenue sur cette belle Coupe du monde organisée en France. Même si les Bleus ont été éliminés en quarts, l’ancienne internationale aura pu vivre au plus près cette compétition au coeur de la « Dream Team RMC ». Une expérience qu’elle a souhaitée nous faire partager. Mais l’occasion était toute trouvée pour évoquer avec celle qui vient de lancer son association « Rugby Girl Académie » les différences de traitement de l’information sportive dans les grands médias. Mais surtout de montrer tout le travail qu’il reste encore à effectuer pour médiatiser de plus en plus le rugby féminin en France.
Lenaïg, vous venez de commenter les rencontres de la Coupe du monde masculine de rugby à xv. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
C’était une grande fierté pour moi de faire partie de la « Dream Team RMC » pour cette Coupe du monde, sachant qu’en plus je suis la seule consultante féminine pour hui hommes, je crois. Bien évidemment, il ne faut pas oublier Winny Claret, qui est journaliste pour RMC. C’est donc important d’avoir des figures féminines à l’antenne pour que l’on puisse aider des jeunes filles à s’identifier à nous.
C’était important pour vous de d’être présente pour ce rendez-vous planétaire ?
Vous savez, je n’avais pas forcément vocation à être journaliste et à travailler dans le monde des médias. Je n’avais pas forcément rêvé à faire cela dans ma vie. C’est une opportunité qui s’est proposée à moi et je l’ai saisie pour vivre au plus près cette Coupe du monde en France.
Comment avez-vous jugé tout et engouement autour de ce Mondial et l’équipe de France ?
Depuis plusieurs mois, l’équipe de France nous propose du beau et réalise de belles prestations, avec le Grand Chelem remporté en 2022. En plus, les Bleus possèdent les meilleurs joueurs du monde, à l’image d’Antoine Dupont. Certes, on parle beaucoup de lui mais il y a d’autres joueurs d’exception dans ce xv de France. Sans oublier les remplaçants. Et puis, vous savez, le rugby véhicule de belles valeurs. Même si les gens ne comprennent pas toujours toutes les règles du jeu, ils adorent le regarder. Si on le compare au football, où il y a des buts et des occasions, le rugby propose plus de choses sur un terrain. C’est pour toutes ces raisons que ce sport qui plaît au grand public.
« Je regrette également que l’on ne montre pas assez de diversité dans le traitement e l’information sportive »
On avait l’impression que dans les médias, il y a eu moins d’engouement autour du xv de France féminin lors de la dernière Coupe du monde en Nouvelle-Zélande. Qu’est-ce que cela vous inspire-t-il ?
Malgré le décalage horaire avec la Nouvelle-Zélande, de nombreuses personnes ont suivi le parcours du xv de France féminin. Battues d’un point par le pays hôte en demi-finales, les Bleues repartent tout de même de ce Mondial avec une breloque autour du cou. Cela change peut-être les choses lorsque tu reviens d’une compétition avec une médaille dans les valises. Et puis aujourd’hui, les filles proposent du beau jeu. Elles méritent plus, je pense…
Le décalage horaire peut-il être un argument acceptable lorsque l’on parle de médiatisation du sport féminin ?
Pour celle en Nouvelle-Zélande, peut-être. Mais en 2017, la Coupe du monde féminine avait lieu en Irlande, avec une seule heure de décalage horaire. Et pourtant, on n’en a pas parlé davantage. Il faut donc communiquer bien plus en amont pour dire aux gens qu’il y a un match des Bleues à la télévision. Si on ne le fait pas, les gens ne peuvent pas être devant leurs écrans. Cependant, il n’y a pas assez de médias qui rendent visible le rugby féminin, à l’image de notre championnat encore trop peu médiatisé.
Selon vous, est-ce que l’on fait un procès d’intention auprès des médias dits traditionnels ?
Un grand oui ! Je regrette de voir qu’il n’y ait pas assez de Une consacrées au sport féminin ans les médias sportifs (En 2021, seulement 15 Unes ont été dédiées au sport féminin su sein du journal L’Équipe, selon le média Les Sportives, Ndlr). Je regrette également que l’on ne montre pas assez de diversité dans le traitement e l’information sportive. En effet, on parle essentiellement du football en France. Et les autres sports n’existent pas. Par exemple, les médias arrivent à trouver mon numéro pour me reparler, trois semaines après, de la polémique autour de la cérémonie d’ouverture de la Coupe du monde de rugby. Par contre, lorsque je les contacte certains médias pour leur présenter « Rugby Girl Académie », et ainsi mettre en lumière le rugby féminin et le sport sociétal , cela n’intéressait plus personne.
« Si on veut avoir de plus en plus de rôles modèles au féminin, il faut permettre à certaines associations qui traitent de ces sujets de voir le jour et de leur donner plus de visibilité dans les grands médias »
Est-ce que le fait de ne pas avoir un championnat professionnel, comme peut l’être chez les hommes avec le Top 14, pourrait-il freiner sa médiatisation ?
Bien sûr ! Moi, je me pose cette question. Comment on fait pour augmenter le nombre de joueuses formées et comment on fait pour développer la base dans le rugby féminin. Très peu de choses sont faites en ce sens. Par exemple, certains clubs masculins ne possèdent pas de section féminine. Dans d’autres cas, il y avait une ou deux filles qui évoluent dans ces structures et qui doivent jouer avec les garçons. Ce n’est pas simple alors de pratiquer un sport de combat dès son plus jeune âge au sein d’une équipe mixte. On perd ainsi de nombreuses opportunités pour développer le rugby féminin. Même si on constate une hausse des licenciées et un engagement de la fédération française de rugby sur ce sujet, je pense que l’on peut aller plus vite et plus fort pour mettre en valeur notre championnat.
Rassurez-nous Lenaïg, y-a-t-il encore des raisons d’espérer pour avoir de plus en plus de rôles modèles dans le rugby féminin ?
Aider les initiatives traitant de sport féminin à se développer. Moi aujourd’hui, je suis une association qui a pour objectif d’inciter des jeunes jeunes filles à découvrir le rugby et ensuite à poursuivre au sein dd’un club. Malheureusement, on me voit comme une concurrence. Sauf qu’en fait, tu te rends compte qu’il y a énormément des enjeux politiques. Il Faut trouver les bons leviers pour pour comprendre comment on peut se faire accompagner. Dans mon cas, c’est assez déroutant car de nombreuses se sont fermées lorsque j’ai demandé de l’aide. Surtout que mon projet, il est chouette. Tout le monde le dit sans me lancer des fleurs. Pourtant, les gens te disent que tu as un beau concept mais lorsqu’il faut mettre la main à leur porte-monnaie, il n’y a plus personne pour te soutenir. Au final, si on veut avoir de plus en plus de rôles modèles au féminin, il faut permettre à certaines associations qui traitent de ces sujets de voir le jour et de leur donner plus de visibilité dans les grands médias.